Olivier Michel

mine de rien
dessins et installation vidéo

du 8 janvier au 2 février 2002


Olivier Michel

Né en 1971
43, rue Cavillier
80000 AMIENS
03.22.95.58.31

Formation
1994Licence d'Arts Plastiques
1991BTS Expression Visuelle, option image et communication
Expositions personnelles
2002"Mine de rien", Galerie du Haut-Pavé, Paris
2000Espace Lumière, Hénin Beaumont
"3 X rien", Galerie du Wazoo, Amiens
1998"eeee", Carré Noir du Safran, Amiens
"Stéréotypie", Centre d'Art Saint Germain, Amiens
Expositions collectives
2001"AONC", Maison de la Culture d'Amiens et l'Espace François Mittérand de Beauvais
"Salon de l'éphémère", Fontrnay-sous-bois
"Jeune Création", Grande Halle de la Villette, Paris
2000"Elémentaires", Eglise St Germain, Amiens
"Dédales", Maison de la Culture, Amiens
"Jeune Création, Espace Eiffel-Branly, Paris
1998"Les Artistes font leur Cirque", Cirque Jules Verne, Amiens
"Rencontre en Aparté", Amiens
1996"Courant d'Art 96", Sèvres
1995"Braderie de l'Art", Roubaix
"Courant d'Art 95", Amiens
Publications
2001CD rom à l'occasion de l'esposition "AONC"
2000Catalogue à l'occasion de l'exposition "3 X rien", texte de Lorenzo Giovannoni
Catalogue à l'occasion de l'exposition "Dédales", texte d'Olivier Grasser
1998"eeee", carte postale, édition Carted no 78
Bourses
2001Aide individuelle à la Création (FIACRE), DRAC Picardie
2000Aide à la Création, Conseil Régnional de Picardie


1996 - Brouillon
17cm X 22cm
Encre sur cahier


1998 - Aléas
50cm X 65cm
Encre sur papier


1998 - eeee
517cm X 195cm
Fusain sur mur


2000 - 3 X rien
Projection vidéo sur traces laissées au mur


2001 - En toile de fond
210cm X 280cm
Projection vidéo sur châssis à clefs toilé


L‘art se caractérise aujourd‘hui par une croissante généralisation d‘indifférence visuelle. Il n‘y a pas longtemps, cette indifférence visuelle fut la chasse gardée des provocations des avant-gardes ; de gré ou de force, les oeuvres d‘art étaient assujetties au régime du beau et du singulier. Or, de plus en plus, ce qui est donné à voir n‘est que la trace contingente, manifeste, d‘une logique sous-jacente qui lui confère tout son sens. Faire sens de l‘oeuvre graphique d‘Olivier Michel, c‘est comprendre le rapport intrinsèque entre le dessin qu‘on perçoit et le dessein délibérément obstrué qui l‘a engendré.
Il me semble distinguer chez Olivier Michel trois logiques de production de sens. Une logique cumulative : l‘artiste supplée le noyau de départ, ajoutant une volute ou une torsade en e, puis une autre et une autre, sur un fond vide, jusqu‘à ce que le sens advienne. Cette logique, tournée résolument vers l‘avenir, procède d‘un dessein clairement identifiable, qu‘elle allie au dessin. Une logique soustractive : l‘artiste présuppose un tout qui existe d‘emblée, un dessein qu‘il faut supprimer par effacement, biffure, obstruction ; une fois éliminé ce dessein en trop, émerge des résidus un sens tout neuf. Cette logique, tournée vers le passé — et bien connue de tous ceux qui mesurent le poids de l‘histoire — oppose le dessin au dessein. Mais il y a une troisième logique — fuyante et pourtant évidente — tournée, pour ainsi dire «vers» le présent qui nous échappe ; tournée irrésolument vers l‘impalpable et l‘implacable du présent. C‘est une logique d‘épuisement et d‘évidement. Car il y a chez lui comme une tentative d‘épuiser tout dessein possible, afin de se retrouver, enfin, en présence du vide. Mine de rien ; 3 X rien : les titres choisis par Olivier Michel sont éloquents à cet égard. On le sent soucieux de «ne pas chercher plus loin», car aller plus loin ce serait déjà prévoir, déjà anticiper, énoncer une stratégie, élaborer un dessein. Nous sommes des êtres tournés vers l‘avenir, et cette troisième logique nous prend quelque peu au dépourvu. Il s‘agit, dit Michel avec simplicité mais non sans mystère, «d‘obstruer l‘espace par le dessin». D‘obstruer, autrement dit, tout dessein, dans la mesure où rien n‘est ni prémédité ni anticipé. Car habiter intensément le présent, suggère-t-il, n‘est-ce pas, malgré tout, renoncer à tout dessein impliquant une prévision de l‘avenir ?
Aussi, l‘artiste cherche-t-il à concevoir des dispositifs où ces trois logiques que je viens d‘énoncer peuvent se déployer parallèlement. Oeuvre discrète, J‘use mon bic, 2001, consiste en un rouleau de papier couvert d‘autant de traits déroulés — gestes dérisoires, accessibles à tout le monde — qu‘est capable de faire un stylo à bille avant de s‘épuiser : là, on a affaire simultanément à une logique cumulative (le dessin s‘accumule sur le support), à une logique soustractive (par le transfert) et à une logique d‘évidement, où le temps même s‘épuise. Si la logique soustractive épuise l‘outil (le stylo), l‘épuisement épuise le possible.
Dans l‘installation vidéo 3 X rien, 2000, on voit, projeté en boucle et à l‘échelle un à même le mur, l‘image diaphane de l‘artiste, filmé de dos, qui trace des boucles en fusain sur ce même mur jusqu‘à ce que qu‘il le couvre entièrement ; puis on le voit se mettre à effacer son oeuvre — c‘est-à-dire à détruire l‘objet plastique à peine créé — dans un processus en perpétuel recommencement.
L‘artiste a récemment poussé ce dispositif un pas plus loin dans une nouvelle projection vidéo, En toile de fond, 2002 : on voit l‘artiste, son dos à un mur blanc, couvrir entièrement de blanc d‘Espagne une grande vitre en verre, puis se mettre aussitôt à l‘effacer, de sorte qu‘il disparaît progressivement sous la surface picturale, puis commence aussitôt à réapparaître. Enfin, c‘est ce qu‘on pense voir : car en réalité, l‘artiste commence par l‘effacement (ce qui lui permet, du point de vue technique, de ne pas disparaître du cadre frontal) et non par l‘acte de tracer. En subordonnant ainsi l‘accumulation à la soustraction, Olivier Michel inverse la logique intuitive et enclenche un processus de mise en abîme, où le dessein s‘efface au profit du seul dessin ; où, en d‘autres termes, le que dessiner ? est conditionné par le comment dessiner ? C‘est dire que si l‘oeuvre d‘Olivier Michel se construit certes dans le temps, elle se construit aussi devant le temps.

Stephen Wright, 2002

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